Inédits









Inédits - M.H.

M.H

POUR MICHEL HOST 

    Il m’apparut par son livre Valet de Nuit. Prix Goncourt 1986. Je venais d’écrire mon premier roman. J’entrais dans le monde littéraire. Ce fut le premier Goncourt que je lus. C’est pourquoi il est gravé dans ma mémoire. Je m’en rappelle chaque geste, chaque ennui, chaque énervement, et surtout, finalement, cette impression d’avoir lu vraiment un livre d’un grand écrivain. Je n’achetai plus beaucoup de prix Goncourt. Atiq Rahimi (pour P.O.L.) ? Jean-Jacques Schuhl (Édith Caven, la musique). Et Duras, bien sûr. Cette force de Valet de Nuit se trouvait dans le ton – j’en ai rien à foutre de ce qu’on pense –, et dans la fantaisie – l’histoire se précipitait.

     Quand j’ai connu Michel Host, j’ai relu Valet de Nuit. Je le voyais autrement (le livre, pas l’homme). Il ne faut jamais être trop proche des écrivains. Il ne se souvenait même plus de certains passages que je lui rappelais.

 Mais… Mais… cela fait rédaction de collège. Un jour, je lui envoyai un texte pour la revue La Sœur de l’Ange. Titre magnifique ! (Il m’apprit plus tard qu’il était issu de Lautréamont). Il me répondit (par deux, trois ricochets insensés sur le Net… bordélique déjà, M.H.) qu’il s’était disputé avec … (je ne sais plus). Il s’est beaucoup disputé. Je n’ai jamais compris s’il avait vraiment le tempérament retors, ou s’il exigeait tant de ceux qu’il fréquentait qu’il fallait qu’ils l’épatent.

    À un moment donné, je ne l’ai plus intrigué. Je ne sais pas pourquoi. Une ouverture littéraire. Les hommes aiment protéger les femmes. Je voudrais, simplement, moi, protéger l’image que je garde de M.H. : un être qu’on aurait voulu toucher et qui ne voulait pas qu’on le touche. Ou… un désespéré magnifique, trop orgueilleux pour… Ou… une vieille bête qu’on n’arrive pas à abattre.

     À toi, Michel (que je n’appelais jamais Michel et que je vouvoyais, la plupart du temps, quoique lui me tutoyait).

     Je me souviens de ceci : il m’écrivit : « Mais quand on meurt, ce qui me dérange, alors le crâne est vide ? »

Pascale de Trazegnies, 11 août 2021